"L'ouverture d'un gigantesque capital artistique"
Le GrosMM (Monard Monade) a officiellement été présenté le 21 Novembre 2015 à Bruxelles. Cette nouvelle monnaie pour l'art est l'aboutissement de plusieurs années de réflexions et de tentatives diverses. Toute une équipe était réunie pour présenter les enjeux artistiques que symbolise ces GrosMM. Déclinés en coupures de 1, 7, 35, 112, ou 560, ils ont pour but de servir à la production et aux échanges d'œuvres à travers un système économique propre.
LE PREMIER MOYEN D'ÉCHANGE POUR L'ART
En novembre dernier, les Fonds GrosMM pour la culture réalisaient une opération quelque peu surprenante : l'émission d'une monnaie de l'art. Ces billets, des actions d'un capital artistique, ayant pour but de financer les productions artistiques, de faciliter la diffusion d'œuvres et d'événements seront mis en circulation effective pour le grand public à partir du 1er Janvier 2016. Tout en assurant aux artistes des ventes équitables pour leurs œuvres, ils sont au cœur d'une organisation financière précise. Inutile d'y chercher une pyramide ou le logo d'une banque car c'est une équipe d'individus provenant de scènes fortement indépendantes, qui depuis près de 3 ans confrontaient les moyens d'amener une solution novatrice pour dégager l'art du "pétrin dans lequel il s'étouffait" au niveau institutionnel. Tout le processus de création, de l'élaboration du système économique à la conception graphique, a vu la participation d'une vingtaine de personnes, issues du monde de l'art ou non, comme Raphael Douglas, ancien commercial de produits manufacturés, désormais responsable litiges au sein des Fonds GrosMM, ou Jon Tchek, artiste issu du collectif Plan B, qui a contribué au renforcement de la sécurité des billets. Que personne ne s'y trompe, tout cela est très sérieux. Ces jeunes ont les pieds sur terre, avec des objectifs clairs pour orienter l'économie artistique vers des circuits courts et de qualité, adaptés aux besoins, respectueux de la production, de sa promotion et de sa diffusion. Une monnaie de l'art éthique, au service des artistes, du public et des œuvres, telle est l'ambition.
Chaque GrosMM est unique et dispose comme toute devise d'un taux de change qui fluctue en fonction de l'offre et de la demande, mais aussi selon le nombre de coupures en circulation. Ces billets sont le résultat d'impressions sous des rotatives diverses de papiers travaillés, qui ont ensuite été traités selon une chaîne de procédés complexes. Des recettes tenues secrètes pour la fiabilité et l'authenticité d'un outil qui vise à dynamiser le territoire de chaque artiste par la valorisation de ses travaux mais aussi en lui donnant les moyens de mettre en application ses recherches.
UNE MÉTHODE FINANCIÈRE, DES NOUVELLES POSSIBILITÉS
Le fonds de garantie, inhérent à toute monnaie, repose sur une mécanique bien huilée comparable à celle mise en place lors des accords de Bretton Woods aux États Unis et abandonnés depuis. Ainsi il n'y a pas plus de GrosMM en circulation que le montant total des oeuvres disponibles au patrimoine. Ils ne servent donc pas directement à spéculer mais financent des projets respectueux du manifeste "Art Territory".
Le lancement officiel fut l'occasion pour Andryw Haggard, chargé de relations, de rappeler l'importance de la gestion des Fonds et le sérieux affiché quand à la fiabilité des premiers résultats :
"L'argent est partout. Mais c'est un outil qui n'a de valeur que pour ce que nous en faisons. Un moyen de faire tourner les affaires. Pourquoi le seul fait de détenir de la monnaie [...] devrait il procurer des revenus ? Ce ne devrait pas être une marchandise que l'on peut s'accaparer et thésauriser. Elle ne vaut rien [...] et devrait être un simple moyen de créer de la richesse".
Au-delà des simples échanges, on est là dans l'acte militant. Chaque GrosMM est comme "un marteau pour la transition artistique", résume l'un des membres responsables. D'où l'adhésion de nombreux artistes émergents qui ont été les premiers bénéficiaires des Gros. On se demandera pourquoi une organisation financière fabrique de l'argent pour le reverser à ses participants et ses fournisseurs... On répondra que c'est une initiative intelligente, qui comprend mieux que ses confrères les mécanismes économiques liés au développement de l'art et de la culture.
UNE STRATÉGIE AUDACIEUSE BASÉE SUR LA PRODUCTION
En battant monnaie et en confiant celle-ci aux propriétaires d'œuvres et aux artistes eux mêmes, les Fonds GrosMM augmentent la confiance de chacun en sa valeur, dont il devient en partie responsable. C'est une autre forme de subvention au développement, mais plus avantageuse parce qu'elle ne nécessite plus l'intervention de tiers de confiance.D'abord, puisque la subvention passe directement par les utilisateurs, que les comptes ne leur sont pas dissimulés, et qu'elle favorise l'intérêt pour le patrimoine et la fidélité de sa clientèle, qui est conseillée et dont les investissements offrent des garanties solides. Surtout, cette démarche représente une aubaine pour les artistes indépendants qui multiplient leur possibilités de produire sans contraintes. L'art d'aujourd'hui joue de l'information, de la propagande, la publicité, l'emballage et la présentation. C'est une stratégie admirable dont les autres institutions –et pourquoi pas les gouvernements– pourraient tirer d'instructives leçons.
Cette nouvelle monnaie s’adresse aux artistes, propriétaires collectivités, structures culturelles et entreprises à vocation artistiques. Mais elle a également pour objectif de créer de nouveaux événements pour mettre en valeur les compétences et les travaux des artistes afin de permettre aux différents publics de vivre des expériences artistiques intenses et mémorables, de par leur pleine implication, principalement en dehors des musées.
Des agents économiques y sont présents pour répondre aux demandes d'informations sur les enjeux de la monnaie et pour mobiliser le public autour de la notion de création,d'innovation et de développement économique de la culture. Une forme de sensibilité de la société qui n'exclut pas les non connaisseurs, mais qui insiste au contraire sur le plaisir que pourra ressentir l'homme de la rue.
Le coffret découverte GrosMM a été présenté lors de la conférence de lancement de la nouvelle monnaie de l'art. il contient une dizaine de coupures, soit une somme de 1430GMM. Aucune communication n'ayant été faite autour de son prix, il ne devrait pour autant pas dépasser les 40 euros (45 dollars). Pour le moment les GrosMM circulent essentiellement au sein du patrimoine, entre artistes et propriétaires. Les premiers agents économiques seront approvisionnés début 2016, date qui coïncide avec l'ouverture au grand public.
Aperçu du pack de GrosMM pour le grand public (Photo Instagram)